Lundi 28 septembre
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L'AUTRE
Je ne contemple pas mais je me contente de faire une description telle que les yeux de l'autre me suggèrent la perception de ces apparences. Habituée à ces regards sculpteurs je me laisse
emporter par ce plaisir de satisfaire cette indiscrétion qui bien que déstabilisante finit par devenir un vecteur de rapprochement inattendu.
Ne s'oublie t-il pas à ne voir que ces courbures qui lui semblent taquiner sa fragilité jusqu'à me confondre avec elles et ne m'appréhender que par les fantasmes qu'elles suscitent en lui ?
Il y a certes en chacune de nous une part de narcissisme et je n'en fais pas exception. Il est cependant aisé de retenir que l'on ne se voit souvent que sous l'angle du regard de l'autre. Cet
autre dont nous appréhendons le jugement et dont le barème nous échappe presque toujours. Effrayées par notre incompréhension nous donnons cette impression d'indifférence qui n'est en fait que
l'expression de notre différence dans la perception de notre égalité.
Carole.
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Je suis pourtant certain que tu n'existes pas seulement dans le regard de l'autre, mais aussi dans le tien propre.
Toute la séduction féminine repose sur ce narcissisme qui nous émeut. Les parures, les vêtements, les dessous, les escarpins et les bas, les bijoux, les gestes qui consistent à se
coiffer, à remonter ses cheveux qu'une épingle ouvragée vient tenir, les séances de maquillage devant la psyché, le soutien-gorge ouaté que l'on pose sur ses seins, le rouge qui enlumine la
bouche horizontale, reflet social de la bouche verticale, intime, secrète, tout cela concourt à votre panoplie. Vous en êtes consciente.
J'observe les femmes dans les boutiques de lingerie quand j'y accompagne mon amie. Elles ne vont pas choisir les parures ringardes, elles retournent, palpent la dentelle la plus subtile, les bas
les plus soyeux qui embellissent la jambe, le body translucide, la guêpière qui marque la taille et fait bondir les seins pigeonnants.
Vous avez repris de manière moins brutale les vulves multicolores des vulves primates en œstrus. Les mâles alors étaient frugivores et leurs rétines sensibles aux luxuriances des fruits et des
baies. Nous avons gardé ces yeux fureteurs. Vous avez fait émigrer vos nuances vulvaires, de façon déguisée, vers l'ensemble de votre corps et singulièrement vers votre visage. La station debout
a libéré vos seins de leur vocation purement nourricière pour en faire des objets succulents à l'œil et à la bouche. Vos fesses se sont rotondisées, vos hanches ont conservé leur volume
afin de continuer à soutenir le nourrisson (sur nos hanches rectilignes, l'enfant glisse !) et à pouvoir vous saisir lors des coïts et notamment de la levrette dont nous avons hérités de nos
ancêtres simiesques.
Je vous vois aussi dans les parfumeries, humant les fragrances à vos poignets. Ces senteurs florales ou musquées se mêlent à vos odeurs sui generis pour affoler nos organes olfactifs.
Vous laissez flotter derrière vous des haleines de cachou, de vanille ou de patchouli. Véritable appel vers nos sens en fusion.
A cet égard, nous-autres hommes n'en sommes qu'à la préhistoire.
Nos vêtures sont tristes. Elles ont oublié la fraise, le jabot, la dentelle, le gilet de soie, la culotte de satin, le tricorne... En vérité, nous n'avons conservé que notre bite et... notre
couteau. Les parangons de la mode masculine vous présentent désormais des athlètes au corps lisse, aux sourires ravageurs, aux barbes rasées, des minets. Ils vous
plaisent presque autant qu'aux gays. Finies les moustaches, les barbes taillées ou hirsutes, les rouflaquettes et les escalopes sur les joues. Les torses velus, les fesses poilues, les
couilles hérissées de végétations pileuses sont quasiment interdits de séjour.
Pourtant, les connaisseuses vous diront qu'une toison pectorale frottant doucement vos tétins sont une succulence, qu'un baiser moustachu est une bien belle chose à goûter, qu'un
cunnilingus où la barbe intervient sur le périnée pendant que la langue titille le clitoris apporte un plus incontestable.
Qu'on nous rende nos manches à crevés, nos hauts de chausse, nos braguettes de cuir, nos chapeaux emplumés, nos bottes de Sept lieux, nos perruques poudrées, nos senteurs de
sperme et de gibier !
Je baise tes doigts aux multiples anneaux.
Tiens, zut ! Une alliance !
M.D.
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